"Affaire Théo" : Daniel Goldberg interpelle le ministre de l'intérieur

Publié le par Aulnay Autrement

Lors de la séance des questions au gouvernement du mardi 7 février 2017, Daniel Goldberg, député d'Aulnay-sous-Bois a interpellé le ministre de l'intérieur quant aux faits graves dont le jeune aulnaysien Théodore Luhaka a été victime.

M. le président. La parole est à M. Daniel Goldberg, pour le groupe socialiste, écologiste et républicain.

M. Daniel Goldberg. Monsieur le ministre de l’intérieur, je voudrais vous parler de M. Théodore Luhaka, que tous ceux qui le connaissent appellent « Théo ». M. Luhaka est un jeune homme sans histoire, passionné de football, serviable, vivant dans le quartier de la Rose-des-Vents à Aulnay-sous-Bois, dans une famille où le respect de l’autre est une valeur forte.

La vie de M. Luhaka a basculé jeudi dernier, au milieu de l’après-midi, quand des fonctionnaires de police ont, selon son témoignage, délibérément attenté à sa dignité. Ils l’ont insulté et frappé avec une volonté constante de l’humilier.

Dès le lendemain, monsieur le ministre, je vous ai dit mon exigence de vérité pour faire cesser un sentiment d’impunité par lequel ces policiers, et ceux-là seulement, se sentaient visiblement protégés. Depuis lors, l’enquête interne de votre ministère a été rapide et transparente. Trois jours après les faits, ces policiers ont été mis en examen. La justice doit maintenant passer pleinement et sans pression d’aucune sorte : c’est notre conception du fonctionnement de la République.

Je veux ici rendre hommage à la grande majorité des policiers, qui sont tous les jours sur le terrain pour nous protéger en étant parfois eux-mêmes agressés, mais je veux aussi souligner la dignité dont fait preuve la famille de Théo.

Comme tout un quartier, comme des milliers de mères et de pères de famille qui pensent que cela aurait pu arriver à leur fils, au-delà de la colère et du dégoût, je me demande comment on a pu en arriver là. Une relation de confrontation permanente, installée depuis la fin de la police de proximité, mine la République.

J’en appelle donc à une prise de conscience nationale pour changer les rapports entre la police et la population dans ces quartiers, notamment pour ce qui concerne les motifs et les techniques de contrôle. Être « avec Théo » aujourd’hui, c’est exiger ce respect mutuel entre citoyens et policiers. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain et sur plusieurs bancs du groupe radical, républicain, démocrate et progressiste et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l’intérieur.

M. Bruno Le Roux, ministre de l’intérieur. Monsieur le député, les faits que vous venez de décrire sont d’une gravité évidente. Mes premières pensées s’adressent naturellement à ce jeune garçon, Théo, à sa famille et à ses amis, qui souffrent de son hospitalisation et des graves menaces qui pèsent aujourd’hui sur son futur et sur ses perspectives de vivre normalement.

Je ne veux bien entendu formuler ici aucune déclaration ni appréciation sur les conditions de son interpellation et sur ce qui s’est passé : c’est aujourd’hui au magistrat instructeur de dire la vérité. Je vous assure, monsieur le député, que tous les éléments ont été transmis, qu’il s’agisse des éléments vidéo ou de ceux qui permettent de retracer cette intervention dans son cadre – avant, pendant et après –, afin que la justice puisse sans délai mener l’enquête, au rythme qui est le sien.

Je suis très ferme, et le Gouvernement veut l’être lui aussi, s’agissant de tragiques événements de ce genre. J’ai donc procédé sans attendre à la suspension des quatre policiers concernés. Je veux également rappeler à leur devoir d’exemplarité tous les fonctionnaires de police et de gendarmerie. Je sais que, dans beaucoup d’endroits et dans la très grande majorité des cas, je n’ai pas besoin de le faire, mais le lien entre la population et eux est central dans le pacte républicain qui doit être le nôtre aujourd’hui dans notre pays. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.) Cela doit être affirmé haut et fort.

Enfin, monsieur le député, puisque la justice est saisie et qu’elle dispose de tous les éléments, j’invite chacun à appeler à la sérénité, comme vous venez de le faire. Il n’est pas de bonne politique de mettre en cause l’État ou la justice au nom d’une prétendue capacité à s’intéresser aux problèmes des quartiers. Je souhaite que ces problèmes soient traités avec la plus grande sérénité. C’est ce que nous faisons, vous-même comme le Gouvernement. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.)

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P
L'affaire est grave et sérieuse.Des policiers,de façon répétée,à l'évidence,outrepassent le cadre de leur mission et commettent des actes tombant,à plus d'un titre,sous le coup de la loi.Dans le cas présent,à l'évidence,la ligne rouge a été allègrement franchie.L'institution croit se protéger en niant le caractère intentionnel (ce serait un accident) alors que l'acte dénoncé relève a minima du viol,qu'il s'apparente même à un acte de barbarie.Les propos (insultes)tenus par les gardiens de la paix viennent éclairer leurs agissements et par là même leurs intentions.Nombre de témoignages concordants accréditent la thèse selon laquelle,tout particulièrement dans ces quartiers populaires,la police tend à cultiver une culture fascisante.Le problème ne peut pas être évacué au motif que ces quartiers ne sont pas les nôtres ou que le FN n'a aucune chance de parvenir au pouvoir.Cela serait irresponsable.Le scandale est d'autant plus réel que la police nationale ne peut pas se retrancher derrière l'argument selon lequel le jeune homme serait un dealer,un délinquant ou quelque chose comme ça.Rien de tout cela à l'évidence:l'homme en question est honnête,n'a rien à se reprocher et sait même faire preuve de civisme.La culture de l’impunité dans la police ça suffit.C’est vrai mais ce n’est pas suffisant.Comment se fait-il qu’un grand nombre de policiers,petits ou grands,se réclament plus ou moins ouvertement d’une idéologie politique qui n’est qu’un avatar de l’idéologie mise en oeuvre par le régime de Vichy (1940/1944 en France) ?Notre police est sans cesse affublée du qualificatif de « républicaine » comme si cela n’était pas évident.Car ce n’est pas évident et c’est bien le problème.Nous exigeons que tous les policiers se conforment aux lois de la République et que certains cessent de confondre leurs missions avec un quelconque soutien (actif ou occulte)à une idéologie fascisante et raciste.Si nous vivons bien dans un pays régi par un Etat de droit alors les gardiens de la paix qui ont commis les actes dénoncés doivent être sanctionnés comme le serait n’importe quel justiciable par la justice criminelle.Le fait que ces actes ont été commis dans le cadre d’une mission de service public n’est en rien une circonstance atténuante mais bien plutôt une circonstance aggravante :la peine devrait être plus lourde.Aux nostalgiques de régimes autoritaires,dictatoriaux et criminels il faut sans cesse rappeler que l’un des principes fondateurs de la République c’est l’égalité devant la loi.
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A
Que ce soit un brave gars comme Théo ou un délinquant multi-récidiviste ne change rien à la nécessité d'avoir des pratiques professionnelles et dignes dans un cadre républicain. Par ailleurs, on ne peut nier qu'il puisse exister un esprit de corps dans la Police comme dans n'importe quelle autre profession, que ce soit en France ou ailleurs. Les actes perpétrés sont terribles et jettent hélas l'opprobe sur des milliers de fonctionnaires de Police qui chaque jour travaillent dans des conditions matérielles souvent difficiles.<br /> On ne peut que souligner l'indigence des moyens mis à disposition à de la police et de la justice en France. Ceci explique aussi peut-être cela.